Scientifiques catholiques : Domingo de Soto, théologien et physicienIl y a quelques jours, je lisais un ouvrage intéressant d'un professeur d'histoire de la théologie à l'Université d'Oxford, Alister E. McGrath (1953), sur la doctrine chrétienne comme véritable laboratoire de la foi où trouver de nouvelles formules pour présenter le christianisme aux yeux des hommes d'une manière nouvelle et attrayante.
Il ne suffit certainement pas de critiquer ce qui ne va pas dans la société, dans les approches culturelles des autres ou dans la vie des autres. Nous devons entrer dans le laboratoire de la doctrine chrétienne et rechercher dans la richesse de la révélation chrétienne de nouvelles approches, des idées attrayantes : "Si le christianisme doit survivre, il devra offrir quelque chose qui soit personnellement transformateur et existentiellement plausible, qui permette un mode de vie significatif, s'il doit faire appel aux nouveaux paysages culturels qui attendent l'avenir" (Alister E. McGrath, The Laboratory of Faith, p. 212).
Après la chute de Constantinople et la perte de l'Empire byzantin dans le monde occidental, de nombreux artistes, sculpteurs, peintres, architectes, musiciens et écrivains ont vu le jour à Florence, Bologne et Rome notamment, qui, à la lumière de la richesse de la littérature classique grecque et latine, ont fait revivre l'idée d'une civilisation fondée sur la dignité humaine.
L'homme est devenu le centre de la vie culturelle, politique et même religieuse. L'homme, créé et racheté par Dieu, libre, peut et doit rendre gloire à Dieu. Suiveurs de Marsilio Ficino et du courant néoplatonicien qu'il tente de remettre en dialogue avec le christianisme, Pìco della Mirandola et Gianezzo Manetti récupèrent la tradition grecque et latine, ainsi que la théologie de l'intériorisation augustinienne, en concentrant leur intérêt sur la définition de la dignité liée à l'incarnation et non plus à la création.
La conception anthropologique adoptée par ces courants philosophiques invitait à contempler la personne dans sa capacité à vivre l'union avec Dieu, mais en se concentrant non pas tant sur l'origine de la personne et sa dignité, mais sur sa potentialité réelle, sur sa capacité à développer cette faculté de rencontre mystique avec Dieu.
De nombreux traités d'anthropologie ont été écrits dans ces années-là et, surtout, l'homme a été placé comme la mesure de toutes choses, comme le dirait Léonard de Vinci. En effet, "Dignité de l'homme" est le titre d'un ouvrage de Pic de la Mirandole (1486) et de Ferrán Pérez de la Oliva (1546).
L'entrée de la Renaissance et de l'humanisme dans les universités a permis de rectifier cet humanisme païen répandu dans toutes les cours raffinées d'Europe, avec trop de traces de la philosophie stoïcienne et de Machiavel.
Dans ce contexte de réforme de l'Église - qui englobait les ordres religieux et les congrégations ainsi que le clergé régulier et séculier, les conciles et, en fin de compte, tout le peuple de Dieu - une transformation intérieure a également été encouragée. Elle comprenait le renouvellement de la théologie, du droit, de la spiritualité et des études bibliques et philologiques, qui ont abouti à la nouvelle version de la Vulgate, la Septante-Clémentine.
Le sommet de l'humanisme chrétien sera constitué par les documents du Concile de Trente et ses expressions pastorales : les séminaires, le missel de Saint Pie V et le catéchisme romain ou paroissial.
Dans quelques mois, nous célébrerons le Vème centenaire du début du magistère de l'Union européenne. Francisco de Vitoria à la faculté de théologie de l'université de Salamanque. Lui et ses premiers disciples, Domingo de SotoMelchor Cano, formeront une pléiade de professeurs qui influenceront toutes les universités d'Europe et d'Amérique, apportant un seul esprit et une nouvelle façon de faire de la théologie : celle de l'École de Salamanque.
Parmi les ouvrages en cours de publication, je voudrais mentionner celui que nous avons récemment publié avec León Gómez Rivas, professeur à l'Université européenne de Bruxelles. Éditions SekotiaL'origine et le développement du projet y sont détaillés.
Francisco de Vitoria, à travers sa chaire de Salamanque, fut à l'origine d'une véritable école de théologiens, souvent issus de l'Ordre de Saint Dominique, qui affrontèrent les premiers défis humains, théologiques et moraux de l'époque, provoqués par l'irruption du protestantisme avec ses différents courants, la découverte, la colonisation et l'évangélisation de l'Amérique, ainsi que les conséquences économiques et sociales de la première globalisation.
Il est intéressant de s'arrêter un peu sur l'importance de l'École de Salamanque, car il est courant de lui attribuer la fondation du droit international et son opposition aux titres que brandissait Charles Quint pour sa présence en Amérique, et peu d'autres choses.
Il s'agit d'une école théologique et juridique parce qu'elle fonde tous ses arguments, ses leçons et ses opinions sur le concept de la dignité de la personne humaine. Non seulement avec la capacité de prendre des décisions morales, mais véritablement en tant qu'enfants de Dieu et dotés d'une personnalité juridique et théologique. Ils défendaient les droits des Indiens, qu'ils adhèrent librement à la foi chrétienne ou non.
Les conséquences sont immenses : la liberté et la responsabilité de gérer l'économie et de la mondialiser, la suppression des obstacles économiques et des craintes liées à l'activité commerciale. Le respect des lois du marché, des prix justes, l'effort pour réduire la charge fiscale des rois et des municipalités.
La lecture de ce livre nous aidera peut-être à mieux comprendre les caractéristiques de l'humanisme chrétien, qui a survécu pratiquement jusqu'à nos jours, de sorte que nous pourrons affirmer que l'esprit de Vitoria est resté latent jusqu'à aujourd'hui.
L'école de Salamanque. Lorsque la pensée espagnole a éclairé le monde
